« Ne t'en fais pas, ce n'est qu'un jeu. Mais à ce jeu là, tu peux jouer ta vie à pile ou face »

« Maman, tu me manques. Tu me manques tellement. » Agenouillée devant une tombe, une jeune brune gardait le regard fixé au sol, ses mains posées à plat sur ses genoux. Les larmes emplissaient ses yeux, naissant au seuil de ses cils peints de noir. Les sanglots la prenaient, mais elle les réprimandait du mieux possible. Elle n’aimait pas pleurer. Pas après cinq ans. Pas après tout ce qu’elle avait vécue. Car, elle en avait vécue des choses depuis la mort de sa mère. Edwina était devenue une chasseuse de vampires. Comment ça ce n’est pas un vrai travail ? Bien sûr que si. Si vous saviez le nombre de vampires  qui peuplent le monde. Et les rues de Londres ne sont pas épargnées. Bon d’accord, elle avait un autre boulot à côté, pour payer le loyer. Elle était professeure de danse. La danse. Une passion qu’elle avait partagée avec sa mère. La jeune femme partit d’un petit rire, tendant une main en avant et frôlant du bout du doigt la pierre tombale. Elle et sa mère avaient l’habitude d’aller ensemble aux cours de danse, de louer parfois une salle et de passer des heures à répéter les chorégraphies qu’elles préparaient pour les spectacles de l’école ou encore pour les castings qu’Edwina devait passer. Elle qui voulait devenir danseuse professionnelle au ballet de Londres… Mais voilà, la vie en avait décidée autrement. Il y avait maintenant cinq ans, la brune avait fait la connaissance d’un être bien particulier. Et pas de la meilleure manière qui soit. L’homme s’appelait Emmanuel de Vonshire. C’était un vampire. Et ce vampire était la personne qui avait tué sa mère. Bon, techniquement, c’était son père qui l’avait fait, s’abreuvant du sang de sa femme pour achever sa transformation. Transformation en quoi ? Me demanderez-vous. En vampire. C’était là qu’on arrivait au dénommé Emmanuel. Ce monstre. Ce connard. Ce…ce…Il avait transformé Henry Northman pour Dieu seul savait quelle raison, en avait fait un être à son image, un monstre assoiffé de sang. Sous le regard de l’adolescente alors âgée de dix-sept ans qu’elle était. Si elle était encore vivante, c’était parce que Maëlys Northman, sa mère s’était sacrifiée pour elle, lui ayant hurlée de partir loin, de fuir de là. Elle savait à quoi elle avait à faire. Elle connaissait les vampires. Son père aussi. Ils étaient tous deux d’anciens chasseurs, retournant de temps en temps tuer quelques uns de ces suceurs de sang. Mais plus autant qu’avant. Ils s’étaient calmés à la naissance d’Edwina. Mais apparemment, leur passé les avait rattrapés. Et de la pire manière qui soit. Toujours devant la tombe, Edwina trembla, sa main quittant la pierre pour venir tomber sur le sol de terre. Elle se souvenait de tout, parfaitement. Partir, fuir, elle n’avait pas pu et s’était contentée de se cacher dans une penderie, tremblante, pleurant, silencieuse. Elle avait assistée à toute la scène. Elle avait vu ce monstre qui n’avait plus rien d’Henry Northman boire le sang de Maëlys. Elle l’avait vu déchiqueté sauvagement la gorge de cette femme qu’il avait pourtant terriblement aimée. Elle l’avait vu laisser tomber le corps de la femme contre le sol, avait entendu le crâne de cette dernière heurter le coin d’une table, se fracasser contre le sol, avait retenue dans sa gorge les cris qu’elle aurait du pousser. Elle avait voulu survivre, avait espérée que sa mère n’était pas morte. Puis, elle avait entendue la porte de la maison claquer, avait vu son père disparaître pour ne jamais revenir. Edwina s’était précipitée alors auprès de sa mère, avait agrippée ses épaules et l’avait secouée. « Maman réveilles toi ! Je t’en supplie, réveilles toi ! » Elle hurlait, les larmes dévalant ses joues, sa gorge se serrant, une terrible nausée la prenant devant la vision horrible de cette gorge déchirée, de ce sang autour du corps inanimé, froid et mort. Mais, bien sûr, sa mère ne se réveilla pas. Elle ne se réveilla jamais. Et Edwina était orpheline. Tout ça à cause de ce vampire. « Je le tuerais, maman. Je te promets. ». Ayant du mal à articuler, l’Edwina de maintenant vingt-deux ans jura une fois de plus de venger la mort de cette femme qu’elle aimait tant, de sa mère. Mais aussi la mort de son père. Pour elle, Henry Northman, l’homme qui l’avait chérie, qui l’avait élevée était mort. Ce vampire n’avait plus rien de lui. Jamais son père n’aurait fait ça. Là, devant la tombe, Edwina sentit sa gorge la serrer encore. Devant ses yeux, elle revoyait le corps de sa mère. Elle sentait encore sous ses doigts la froideur du cadavre maternel. Et puis, il y avait eu l’orphelinat… Pendant 5 mois, très exactement. Jusqu’à sa majorité, âge auquel elle était simplement partie d’elle-même, en ayant alors le droit. Ces personnes, elle les avait haïs. Tellement. Ils avaient dit la comprendre. Mais non, ils ne comprenaient pas. Ils ne pouvaient pas comprendre. Qui le pourrait d’ailleurs ? Ils n’avaient pas vu ce qu’elle avait vu, elle. Ils n’avaient pas ressentis ce qu’elle avait ressenti. Ils n’avaient pas dans leurs poitrines cette plaie béante qui jamais ne se refermerait entièrement. Elle avait eu l’impression d’étouffer dans cet orphelinat, avait prié pour mourir. Pour finalement se battre pour vivre. Elle devait vivre. Elle devait tuer le vampire. Après, elle pourrait se laisser mourir de chagrin. Mais avant d’avoir le cadavre de ce monstre dont le visage était encore bien présent dans sa mémoire devant ses yeux, elle n’avait pas le droit de se montrer égoïste.


« Edwina, tu vas les bouger ces poings, oui ou merde ? » Dans la salle d’entraînement des chasseurs de la ligue, la jeune femme âgée de vingt-cinq ans tapait dans un punching ball depuis presqu’une heure. Et, d’après elle, elle les bougeait ses mains. Mais le chasseur qui la surveillait aujourd’hui ne semblait pas du même avis. Oh et puis qu’il aille se faire foutre ! Et puis d’abord, pourquoi on lui avait collé quelqu’un pour la surveiller à elle ? Ca faisait sept ans qu’elle chassait dans la ligue, depuis sa sortie de l’orphelinat. Alors merde ! Mais, il avait fallu qu’elle se fasse attaquer assez durement et sauvagement par un vampire, lors de sa dernière chasse. Il y avait maintenant six mois de ça. Deux semaines dans le coma à cause de ce putain de suceur de sang de merde. Et six mois d’arrêt. Elle avait eu trois côtes cassées, la mâchoire pas mal amochée non plus et avait perdu énormément de sang, gardant une cicatrice sur sa gorge qui maintenant ne se voyait plus quand elle se mettait du fond de teint. Poussant un soupir, la chasseuse adressa à son surveillant un sourire plein d’hypocrisie et tapa plus fort, à s’en déchirer les phalanges. Heureusement qu’elle portait des gants. « Voilà, là c’est mieux » Dit-il, sourire aux lèvres. « Tu reprends du poil de la bête. » Edwina leva les yeux au ciel. Reprendre du poil de la bête, expression stupide ! Edwina frappa encore avant de finalement s'arrêter et d'ôter ses gants. « Mais qu'est-ece que tu fous ? » S'exclama l'homme. « Tu les remets et tu continues ! ». « Hors de question ! Tu sais comme tous les autres ce que je vaux. Tu sais comme tous les autres que je suis une excellente chasseuse et que mon accident n'était dû qu'à de la malchance! Tu sais comme les autres que je n'ai pas besoin de ce test stupide ! » Elle cria et s'adressa un regard noir de son supérieur. Mais la jeune femme lui répondit de la même manière avant d'attraper son sac de sport et de sortir de la salle, claquant la porte derrière elle. « Edwina Maëlys Northman, tu reviens ici tout de suite ! » Hurla-t-il. Mais la chasseuse était déjà loin. Rentrant dans l'appartement qu'elle partageait avec Ethan Goldsmith pour des raisons financières, elle jeta son sac dans un coin et se dirigea vers la cuisine, faisant un café et s'asseyant sur le plan de travail tandis que ce dernier se préparait, ses jambes se balançant dans le vide. Pour qui se prenait-il ? Énervée comme souvent, elle prit sa tasse dans ses mains et s'empressa de le boire, se brûlant les lèvres au passage. Elle s'était faite attaquer. Cela ne se reproduira plus. Point final.